Carrefour : l’État plie face à un chef de gang et ferme ses institutions

Carrefour : l’État plie face à un chef de gang et ferme ses institutions

Ce lundi 17 novembre 2025 restera comme une nouvelle démonstration troublante de l’effondrement de l’autorité de l’État à Carrefour. Sous la pression directe du chef de gang Krisla, la commune s’est retrouvée totalement paralysée : institutions publiques fermées, services essentiels indisponibles, écoles et entreprises privées désertées. Une fois de plus, c’est un acteur armé, et non l’État haïtien, qui dicte le rythme de la vie quotidienne d’une population pourtant abandonnée depuis plus de 18 mois par la Police nationale d’Haïti.

Alors que Krisla annonçait une grève générale en représailles à une offensive policière menée sur la Plaine du Cul-de-Sac contre le gang 400 Mawozo, allié au sein de la coalition criminelle « Viv Ansanm », les institutions publiques ont été les premières à se soumettre. La Direction Générale des Impôts (DGI), l’OAVCT, la Banque Nationale de Crédit (BNC), la Mairie de Carrefour et d’autres services étatiques ont fermé leurs portes sans aucune communication officielle. Le message implicite est clair : l’État n’a ni la capacité, ni la volonté d’opérer dans cette commune placée sous l’autorité d’un chef de gang.

Le secteur privé n’a pas tardé à suivre. Écoles, universités, magasins, institutions financières et entreprises diverses ont suspendu leurs activités, incapables d’assurer la sécurité de leurs employés et de leurs clients. Carrefour, large commune comptant plus de 500 000 habitants selon un rapport daté de mars 2015 (Wikipédia), s’est transformée en ville morte du jour au lendemain, non pas par décision gouvernementale, mais sous ordre d’un homme armé contrôlant un territoire déserté par les autorités.

Cette grève forcée intervient dans un contexte de tensions accrues. L’offensive contre les 400 Mawozo survient après l’éclatement d’un dossier nébuleux impliquant la famille Apaid, dont les révélations ont poussé l’État à prendre certaines mesures contre les gangs. Une réaction jugée sélective par plusieurs observateurs, qui dénoncent l’apparent double standard dans la gestion sécuritaire du pays : des années de violences ignorées, puis une mobilisation soudaine lorsque des intérêts économiques de haut niveau semblent menacés.

Le contraste est amer pour les habitants de Carrefour, qui n’ont plus vu une patrouille policière depuis plus d’un an et demi. Aujourd’hui encore, l’État brille par son absence, au moment même où les décisions les plus importantes concernant leur sécurité, leur travail, l’éducation de leurs enfants ou leur liberté de circuler sont prises par des criminels.

La fermeture coordonnée de tant d’institutions publiques, sans la moindre résistance ni explication, symbolise l’un des constats les plus accablants de la crise haïtienne : dans plusieurs zones, le pouvoir réel n’appartient plus aux autorités élues ou administratives, mais bien aux chefs de gangs qui imposent leur calendrier, leurs sanctions et leurs “décrets”.

À Carrefour, en ce 17 novembre 2025, l’État n’a pas seulement été absent. Il a été suppléé, remplacé, effacé au profit d’un chef de gang dont l’autorité semble plus redoutée que celle des institutions nationales. Et pour une population laissée à son sort, cette réalité est devenue la norme.

GPL Media Libre

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