« 2026, année électorale et de libre circulation des personnes et des biens », prévient le Premier ministre

« 2026, année électorale et de libre circulation des personnes et des biens », prévient le Premier ministre

À moins de deux mois de l’échéance de l’Accord du 3 avril, le gouvernement dirigé par le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé assure vouloir faire de l’année 2026 un tournant décisif en matière de sécurité et de retour à l’ordre constitutionnel. Lors du premier forum de la Fédération nationale des Conseils d’administration communale (CASEC), le chef du gouvernement a appelé les élus locaux à se mobiliser contre le banditisme, tout en réaffirmant l’objectif d’organiser des élections générales en 2026.

Déclarant 2026 « année électorale et de libre circulation des personnes et des biens », le Premier ministre conditionne néanmoins la tenue du scrutin à une amélioration substantielle de la situation sécuritaire. Une exigence qui soulève de nombreuses interrogations, alors que de vastes portions du territoire national échappent toujours au contrôle effectif de l’État et que les groupes armés continuent d’imposer leur loi, y compris aux abords immédiats de la capitale.

Si le discours officiel insiste sur la nécessité d’une reconquête sécuritaire, aucun calendrier précis ni indicateur mesurable n’a été présenté pour évaluer les progrès attendus. L’appel à la mobilisation des CASEC et des ASEC, des structures locales souvent dépourvues de moyens et exposées aux représailles des gangs apparaît, pour plusieurs observateurs, comme un transfert implicite de responsabilité, dans un contexte où l’État peine encore à garantir la sécurité de ses propres représentants.

Sur le plan sécuritaire, l’annonce de la mise en place de Conseils de sécurité dans toutes les sections communales, sous l’autorité du Conseil supérieur de la Police nationale (CSPN), se heurte à une réalité préoccupante. La Police nationale d’Haïti fait face à un déficit persistant d’effectifs, d’équipements et de capacités opérationnelles, tandis que la coordination institutionnelle demeure fragile. Dans ces conditions, le partage d’informations, aussi nécessaire soit-il, risque de rester largement théorique.

En présence du ministre de l’Intérieur et des Collectivités territoriales, Paul Antoine Bien-Aimé, le Premier ministre a réitéré la détermination de l’Exécutif à neutraliser durablement les groupes armés et à rétablir l’autorité de l’État. Sur le terrain toutefois, les populations continuent de subir enlèvements, déplacements forcés et restrictions de circulation, alimentant un profond scepticisme face à des annonces gouvernementales jugées répétitives.

Enfin, l’annonce visant à doter chaque section communale d’un téléviseur et de panneaux solaires à l’occasion de la Coupe du monde 2026 a suscité des réactions mitigées. Si l’initiative se veut symbolique et fédératrice, elle interroge sur les priorités de l’action publique dans un pays confronté à une crise sécuritaire, humanitaire et institutionnelle sans précédent.

Entre discours volontariste et réalité du terrain, la stratégie du gouvernement en vue d’élections souveraines en 2026 apparaît ainsi comme un pari à haut risque. Sans avancées concrètes et rapides sur la sécurité et la gouvernance locale, les promesses officielles pourraient, une fois de plus, se heurter à la profonde défiance d’une population durement éprouvée.

Jean Daniel PIERRE

GPL Media Libre

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